« Nice terre de vélo » ? La bonne blague !

Le 5 septembre dernier se tenait au Palais de la Méditerranée la 7e édition du Forum des Projets Urbains de la Méditerranée, dont l’un des ateliers portait sur la mobilité durable et l’aménagement urbain dans la Métropole Nice Côte d’Azur.

L’occasion de voir comment l’aménagement à Nice décourage plutôt la pratique du vélo, et persiste à favoriser l’utilisation des véhicules thermiques.

Dans la vallée de la Vésubie, peu avant d’arriver à Saint-Martin, la Métropole a fait installer un grand et joli panneau prétendant que Nice est une « terre de vélo ». Une affirmation plutôt osée, alors même qu’entre Plan-du-Var et le col de la Colmiane (50 km), il n’y a que quelques centaines de mètres de pistes cyclables.

Ce constat est à l’image de la façon dont la Métropole appréhende la question du vélo : beaucoup de communication et de marketing politique, dont le plus beau coup est sans conteste l’accueil de la dernière étape du Tour de France, mais sous le verni, très peu de réalisations. Bien plus : les aménagements anciens comme récents favorisent systématiquement les véhicules polluants.

L’exemple est anecdotique, mais résume bien la politique de la Métropole : à la hauteur de la plage dite des Bains militaires, qui abrite le Club nautique de Nice, des travaux récents effectués sur les arceaux prévus pour les 2-roues ont porté ceux dédiés aux motos et scooters de 18 à 19, tandis que ceux prévus pour les vélos sont passés de 10 à 6.

On pourrait également évoquer l’absence d’aménagement de piste cyclable sur la rue Arson à l’occasion de sa récente rénovation, alors que la place existe, avec 3 voies consacrées aux voitures (en incluant la voie de stationnement). Or, en l’absence de piste cyclable, malgré les demandes restées à ce jour sans réponse de l’association Nice-à-vélo, la municipalité se met en infraction avec la loi et à l’article L228-2 du code de l’environnement, qui oblige à la réalisation d’itinéraires cyclables lors des rénovations de voies urbaines.

Alors certes, des progrès ont été réalisés ces dernières années, mais ils se limitent à l’hypercentre. Ailleurs, et notamment à Nice-est, la dynamique reste la même : les aménagements urbains décidés par la Métropole privilégient toujours des moyens de transport polluants, dangereux, bruyants et qui contribuent à l’engorgement de la ville, au détriment d’un mode de transport qui n’est pas polluant, pas dangereux (sinon pour les utilisateurs…) et silencieux.

Un dernier mot sur le tramway : Nice est probablement la seule ville de France qui a profité de l’implantation du tramway pour restreindre la place du vélo, sur l’avenue Jean Médecin, sur le boulevard Jean-Jaurès, sur l’avenue de la République, mais également sur le boulevard Saint-Roch, où l’étroitesse des rues ne permet pas aux cyclistes de rouler sans subir la pression des automobilistes bloqués derrière eux.

Cette absence de prise en compte du vélo constitue une erreur historique commise lors de l’aménagement de la ligne 1 du tramway. Une erreur qui impacte les cyclistes, mais également les commerçants. Des études montrent en effet que la plupart des clients vivant à proximité des commerces urbains viennent majoritairement à pied, à vélo ou en transports collectifs : 84 % des habitants des centre-villes privilégient les commerces de proximité, et 13 % de ces acheteurs viennent en vélo. Ce sont donc ces 13 % dont sont privés les commerçants de boulevard Jean-Jaurès ou de l’avenue de la République, les commerces ayant d’ailleurs tendance à péricliter dans ces deux artères, et également, dans une moindre mesure, ceux du boulevard Saint-Roch et de l’avenue Jean-Médecin.

Concernant la ligne 2, la Ville a même réussi l’exploit, sur l’avenue de la Californie, d’augmenter le nombre de places de stationnement. Il faut croire que, politiquement, il est plus rentable de favoriser le stationnement des véhicules thermiques plutôt que des vélos…

En bref, on peut toujours causer de mobilité durable en dégustant des petits fours dans le décor prestigieux du Palais de la Méditerranée, mais dans les faits, les aménagements à Nice témoignent toujours d’une prédilection accordée à la bagnole.

Gilles Mortreux