Emission radio publique au Globe à l’Ariane

Samedi 29 février à 15h30, l’équipe du média ligne16 et de l’association Alter-Égaux a accueilli les habitants de l’Ariane au Globe, un café du quartier essentiellement fréquenté par les hommes, afin de participer à l’émission publique sur le sujet : « L’occupation de l’espace public et des terrasses de café par les hommes et les femmes ».

Hadia habitante de l’Ariane, s’est portée volontaire pour être l’animatrice-présentatrice de l’émission ainsi que Nawel qui a proposé une chronique : “les terrasses de café sont-elles à l’image de l’Ariane?”. La conduite de l’émission a été construite à partir des interviews réalisées au début du projet dans les rues de l’Ariane et trois parties se sont dessinées de manière évidente.

La première partie rentrait dans le vif du sujet avec l’occupation de l’espace public par les hommes et les femmes, qu’en pensez vous ? ; Puis, la répartition des tâches dans le foyer a été abordée et enfin les stéréotypes qui perdurent dans notre société contemporaine. Chaque partie démarrait par un court extrait sonore des interviews recueillies dans le quartier : Saïda et Tony, Dolette puis Nathalie.

Voici l’intégralité de l’émission :

« On retrouve une mentalité ancestrale, un retour en arrière », exprime Jocelyne face au propos de Saïda entendue dans l’extrait écouté. Celle-ci exprime la peur du jugement, le fait que les femmes ne vont pas dans les terrasses de café pour ne pas manquer de respect à leurs pères, leurs frères et leurs maris.

Mélina d’Alter égaux et Khadidja du CIDFF engagées pour la mixité dans l’espace public et l’égalité homme-femme, ont évoqué plusieurs raisons pour lesquelles nous trouvons davantage de femmes occupant les parcs urbains et les jardins d’enfants tandis que les hommes sont plus nombreux à occuper les terrasses de café.

A ce sujet, un article récent de Télérama “La ville c’est aussi pour les femmes” du 18 mars 2020 cite une sociologue, Dominique Poggi, qui dit très justement : “En effet, tandis que la femme, sans cesse, veille à tout – les courses, ses enfants, sa sécurité -, l’homme moins mobilisé depuis toujours par la logistique du quotidien, moins harcelé aussi par ses semblables, trace sans détour de la maison au boulot. Mais, il peut aussi, insouciant, s’arrêter au café ou ailleurs, se poser où il veut, traîner sans qu’on le juge. La société même, l’y encourage. (…)”. Dans cet article, est cité également l’anthropologue Chris Blache qui résume tout cela à : “Les hommes occupent l’espace public, les femmes s’occupent dans l’espace public ». Pour elle : “La présence des femmes dans la ville passe par leur visibilité et par leur reconnaissance pleine et entière ».

Pour Khadidja, les hommes et les femmes ne se mélangent pas, n’occupent pas les espaces ensemble et c’est cela qui pose problème.

Le problème qui se pose est davantage la mixité dans l’occupation de l’espace public.

 

Ibrahima un habitant du quartier a témoigné de sa situation. C’est lui qui s’occupe des enfants, des réunions à l’école, du ménage et des courses alors que sa femme, aide soignante, a un emploi et ses horaires ne permettent pas à Ibrahima de travailler aussi. C’est un choix donc qu’ils ont eu. Pourtant, Ibrahima témoigne des réactions du quartier. Certains pensent que ce n’est pas son rôle en tant qu’homme. Certains restent surpris de ce mode de fonctionnement inhabituel.

Certaines femmes dans le public se sont offusquées quant aux applaudissements pour Ibrahima qui assure le foyer. “Cela devrait être normal ». Néanmoins, des femmes reconnaissent dans la salle qu’elles ne laissent pas la place à leurs maris, prétextant qu’ils ne vont pas bien faire.

Il a été question bien sur de l’éducation des enfants qui ont tendance à reproduire le fonctionnement de leur foyer. Certains jeunes de l’Ariane témoignent de l’inégalité comme par exemple pour un jeune homme de 17 ans qui exprime son regret de ne pas pouvoir faire le ménage ou aider à la cuisine car cela n’est pas son rôle en tant qu’homme. Une autre jeune fille de 14 ans exprime le fait que son frère du même âge n’aide pas aux tâches ménagères alors qu’elle, se doit de le faire sous la pression de ses parents. Nawel exprime selon elle, que ce sont les traditions qui persistent.

Michel lui qui a travaillé en tant qu’aide soignant, précise aussi que c’est difficile d’exercer un métier qui est généralement exercé par des femmes.

Un autre homme à la retraite précise que dans les années 60, la femme devait non seulement s’occuper du foyer mais être disponible pour son homme qui rentrait du travail. L’Église entretenait ce schéma.

Pour finir, on voit bien que le chemin est encore long mais que les mentalités évoluent peu à peu et que les femmes à présent, sont moins dociles lorsque leur homme leur demande : « qu’est-ce qu’on mange ? ». Elles sont nombreuses à leur retourner la question. Il n’en reste pas moins que celles qui osent plus facilement sont celles qui ont aussi une situation indépendante financièrement et sont épanouies dans leur travail.

La société évolue aussi quant au congé parental que les pères peuvent demander, ou encore certains pays comme la Suède qui inverse les rôles en proposant des cours de cuisine aux hommes et des cours de bricolage aux femmes.

L’émission a pu se terminer par un poème d’Abdou, habitant de l’Ariane, et par un goûter offert par Ligne16 et concocté par l’équipe du Globe.

Bravo à Hadia qui a assuré l’animation et la présentation de l’émission, à Nawel pour sa chronique, à Melina et Khadidja pour leurs interventions ainsi qu’à tous les participants pour ce moment convivial et riche en échanges.

Tania (article), Sirine (photos et montage audio de l’émission).